Depuis plusieurs semaines, j'ai senti le vent du changement (pas le souffle venu de Hollande, non...le changement à la maison), je vois bien que son comportement est perturbé, j'entends bien ses peurs.
Et j'ai la sensation de plus en plus nette de marcher sur un fil, puis au moindre faux pas de chuter, pour devoir nous relever, encore, et repartir, espérant atteindre l'autre côté de la faille sans choir encore.
J'ai toujours donné le maximum de mon amour à mon enfant, sans la laisser pleurer (dans la limite des stocks de calme disponibles), en la serrant contre mon coeur si tel était son besoin.
J'ai toujours pensé que je devais lui "apprendre à faire seule" (Maria, si tu m'entends...), être là pour la guider sur le chemin de son autonomie.
Je ne sais pas vraiment quand tout a basculé. Quand de guidance, je suis revenue à gérance. Quand, loin de la serrer contre moi pour la réconforter, j'ai refermé mon amour sur elle pour l'empêcher de voler.
Comment brise-t-on sa promesse inconsciente? Pourquoi oublie-t-on qui l'on est?
Et puis j'ai atteint la limite. Alors j'ai ouvert les yeux. Et j'ai vu. Ce que j'avais fait, sans doute, trop engluée dans les méandres de mes propres problèmes pour me rendre compte à quel point mon enfant glissais dans sa propre souffrance.
Je me suis vue, finalement, l'empêcher de faire toute seule. Etre fatiguée d'être sans cesse l'objet de ses besoins mais ayant créé de toutes pièces probablement, cette situation.
Je crois bien que j'ai fait tout ce que je m'étais jurée de ne jamais faire. Je crois que sans être consciente de cela, j'ai fait en sorte que ma fille redevienne totalement dépendante de moi. Accrochée à moi comme un jeune koala à sa mère. Refusant le contact avec les autres, refusant tout ce qui ne venait pas de moi. C'est commode, ça me permet d'exister, d'être le centre de son monde. Ca me permet de me raccrocher à elle lorsque tout autour s'effondre.
Ces derniers temps j'ai oublié qui je suis. J'ai tressé moi-même brin à brin le fil sur lequel nous marchons.
Mais j'ai compris. Pleuré aussi. Beaucoup.
Et puis...tout doucement... j'ai recommencé l'apprentissage. Lui montrer qu'elle peut voler de ses propres ailes, des ses propres Elle. Ne plus faire pour elle mais avec elle. Tenir sa main, oui, mais surtout faire en sorte qu'elle s'autorise à le faire parce que je lui en aurais laissé la latitude.
La laisser retourner vers les autres, ma petite fille au grand coeur et au sourire immense. Lui montrer que j'ai suffisamment confiance en elle pour être sûre qu'elle saura toute seule où elle se sent bien.
Chaque "victoire" emplit mon coeur de joie. Je me rends compte que tout va très vite, elle est intelligente cette petite, mine de rien (
En quelques jours, elle a grandi parce que je l'ai laissée le faire. Parce que j'ai RE-pris ma place d'adulte. Parce qu'au fond je suis une femme (et une mère) responsable, je crois. Parce que mon Bonheur n'appartient qu'à moi et que j'en suis la propre actrice.
Parce qu'elle est une enfant, mais qu'aujourd'hui autant que lorsqu'elle aura 20, 30 ou 40 ans je n'ai pas le droit de lui voler sa vie. Etre mère, c'est lui donner les plumes pour qu'elle s'envole. Et souffler, doucement, pour qu'elle prenne le vent.
Et cesser, enfin, de marcher sur le fil.