vendredi 29 juin 2012

Rester enfant...

Aujourd'hui était mon jour favori de l'année scolaire. Mais non, mauvaise langue, pas le dernier. Le dernier jour, je l'aime bien et je ne l'aime pas. Je ne sais jamais comment laisser partir mes gnomes le temps d'un été ou pour toujours, pour ceux qui partent au collège. J'ai envie de leur dire que je suis fière d'eux, que j'ai observé chacun de leurs progrès et que je les ai notés dans mon esprit comme autant de pépites d'or humain collectées dans ma vie. J'ai envie de leur souhaiter bonne route sur le chemin de leur vie. J'ai parfois envie de les serrer tout contre mon cœur, furtivement, comme pour leur dire "je ne t'oublierai pas...". Bref, le dernier jour, ou plutôt la dernière heure de l'année n'est pas une partie de plaisir.

Mais cela est une autre histoire....
Aujourd'hui était un jour spécial, celui où je recevais dans ma classe un auteur de littérature jeunesse dont nous avions lu des oeuvres en cours d'année. Cela arrive chaque année, dans le cadre d'un petit salon du livre jeunesse qui s'organise dans la commune avec laquelle je me trouve en RPI (Regroupement Pédagogique Intercommunal).

Nous avons donc la chance, chaque fin d'année, de recevoir dans notre classe un auteur, de pouvoir le questionner, échanger, comprendre ce qui le pousse vers l'écriture et connaître son métier. Rire et nous émerveiller. Je ne sais pas si mes élèves prennent la mesure de la chance qui est la nôtre, mais je m'efforce de leur en faire prendre conscience.
Et cette année, cette rencontre a eu une saveur tout particulière. La première raison est que, lorsque nous avons du choisir l'auteur que nous souhaitions rencontrer, parmi ceux qui participent au salon, un livre a attiré mon attention sur la table. Je l'ai ouvert et je suis tombée en amour pour ce livre. L'histoire, l'illustration, tout me parlait, m'attirait. J'ai rarement été aussi émue devant un livre, allez comprendre... Je crois que mon coup de foudre fut clair, tout le monde a bien vite compris qui je souhaitais recevoir. J'attendais donc aujourd'hui sa venue avec une impatience notoire...

Et Jean-Yves le Guen est arrivé. Avec son sourire, ses livres et sa guitare. J'ai su que je ne m'étais pas trompée à l'instant où je l'ai vu. Il s'est présenté, lui, le "petit auteur-bah oui je mesure 1m63 hein". A dit préférer le terme d'auteur à celui d'écrivain, expliquant que nous étions tous des auteurs, dès lors que nous produisions un texte. En un mot comme en cent, je l'ai adoré. Et à en croire mes élèves suspendus à ses lèvres, eux aussi.

Tout de suite, Jean-Yves nous a mis à l'aise. Il m'a très vite tutoyée, nous a parlé de sa vie, de sa maman et de ses petits-enfants. De la petite dernière, Rose. Il a attrapé sa guitare et nous a fait chanter ses chansons. Il m'a émue, certains mots ont résonné en moi bien plus profondément que je ne l'aurais imaginé. Il a su capter l'auditoire bien plus sûrement que n'importe quel combat Beyblade ou qu'un millier de cartes Pokémon ultra rares. Mieux qu'un match de foot avec un arbitre "qui comprend rien". Mieux qu'une rencontre avec Monsieur Pi. Mieux qu'une lecture commune à l'ombre du grand arbre les derniers jours de l'année.

Les élèves ont découvert de façon vivante le parcours d'un livre, depuis son écriture jusqu'à nous, lecteurs. Ils ont été impliqués dans chaque étape de son intervention et ils ont adoré ça. Leurs yeux pétillaient, et que dire des miens... Ce jour-là c'est celui que je préfère car je m'accorde à me laisser submerger par l'âme de l'enfant qui est resté en moi. Et j'aime ça. Passionnément. Autant vous dire que l'heure trente a filé comme l'eau entre mes doigts. Et que je bous d'impatience de me rendre au salon, demain, faire dédicacer par ce très grand monsieur mon coup de coeur... Le grand voyage d'Hortense.

Le grand voyage d'Hortense, c'est l'histoire d'une vie, des quatre saison que l'on y traverse. Avec beaucoup de pudeur, de douceur, Jean-Yves Le Guen y raconte le premier et le dernier voyage de cette petite bonne femme qui n'avait jamais quitté son jardin... L'album est illustré par sa fille, Christelle Le Guen, et c'est un vrai régal. Un plaisir pour les yeux et l'esprit. En bref, au cas où ça ne serait pas clair, c'est un livre que je vous conseille. On peut le lire assez tôt, et y voir chacun quelque chose. Mes CE1 par exemple ont bien accroché et ont compris beaucoup de choses. Une perle à avoir dans sa bibliothèque, je pense.


Voilà pourquoi cette année, cette journée s'est particulièrement bien déroulée. Mais ce n'est pas fini!
On nous avait proposé de recevoir dans nos classe, le temps d'une demi-heure, un certain Antoine Boivin, auteur des Boivinoscopies. Sans nous donner trop de détails, en nous expliquant que ce serait une surprise. Et moi, j'adore les surprises.

Voilà donc que ce matin, en pleine séance de correction de dictée ardue, quelqu'un toque à la porte.  Entre alors un grand monsieur. Il porte un costume que même en plein nuit on ne pourrait manquer de remarquer, arbore un large sourire et laisse à pense que ce qui va suivre sera un petit délice...

D'abord, Antoine Boivin se présente, il est "le pape du pop up". Ambiance...
Les enfants se taisent, ils sont captivés par cet étrange personnage qui s'est installé dans notre classe comme s'il nous connaissait depuis toujours. J'avoue que j'en suis au même stade. Etonnée, émerveillée. Silence...je savoure.

Nous comprenons assez vite qu'Antoine Boivin est ici pour nous parler de livres pop-up, ce pape en a d'ailleurs apporté deux géants de sa conception. Un polar intitulé "ça bute à Chaumont" (déjà rien que ça....j'applaudis!), plein d'allusions géniales et d'humour décapant...
Dans la vie, il y a des hauts et...
Des bas :D
Ce premier pop-up est, nous explique-t-il, un livre au format italien, c'est àdire qu'il se lit posé à l'horizontale. Les enfants sont captivés, et moi je souris à pleines dents. C'est bon, c'est drôle. C'est génial.

Ensuite, ce génie nous évoque La Fontaine, ses fables. Pour être bien sûr que les enfants savent de quoi il parle, en moins de trente secondes, il dessine le fameux La Fontaine au tableau. Instant magique, j'immortalise.



S'ensuit alors la lecture d'un pop-up au format anglais, celui-là. Un de ceux qui se lit verticalement. Moments choisis, rien que pour vous...




A la fin de sa lecture, Antoine Boivin nous annonce la fin. Comme tout le reste de son "show". Pas comme tout le monde.

Puis doucement, il remballe ses livres et plie bagage. Cinq minutes plus tard, il a disparu. Comme un mirage. C'était génial, c'était trop court. Vivement demain, il paraît qu'il a préparé tout un spectacle. Je vais, je crois, me glisser au milieu des enfants. M'asseoir au fond de la salle, discrètement, et ouvrir grand mes yeux sur le monde fabuleux dont il ouvre la porte. Et rêver, encore. Toujours.

Aujourd'hui, c'était le plus beau jour de l'année scolaire. Et demain, ça continue...

mercredi 13 juin 2012

N'oublie pas...

J'ai déjà écrit une fois sur le sujet mais quand je parle autour de moi, je prends conscience que le monde est rempli de personnes comme celle qui m'a faite souffrir... et qu'il est important d'en parler.
Toujours, pour ne jamais oublier. Pour ne jamais laisser la peur ou la culpabilité prendre le dessus. Pour briser le silence et faire en sorte que ça ne devienne pas la "norme".

Parce que subir une agression sexuelle, c'est une lourde épreuve. Une épreuve qui marque à vie, qui trace une partie du chemin à venir sans que l'on puisse changer ce qui s'est passé. Et ce, quelle que soit la gravité de l'acte que l'on a subi.

Bien sûr qu'on peut vivre avec. Chercher, à chaque instant, à avancer pour faire de cette attaque une force, pour se forger dans la douleur une carapace protectrice. Et puis...a-t-on vraiment le choix?

Bien sûr qu'on peut croire qu'on oubliera. Sauf que l'on n'oublie jamais. En tout cas, moi je n'ai jamais su oublier. Je m'efforce depuis des années de masquer cette douleur, d'en faire quelque chose de bien pour moi. Ça m'a rendue plus forte que je n'aurais seulement pu l'imaginer mais je suppose que je préfèrerais être moins forte et ne pas porter ce poids sur mon cœur. Je suppose...

Bien sûr qu'on sait que l'on n'est pas coupable et pourtant...c'est difficile de se défaire de ce sentiment et de la honte qui l'accompagne...ça m'a pris des années, pour faire le point et m'en libérer. Ça m'a pris aussi une rencontre. Une thérapeute, une personne totalement extérieure et dont c'est le métier qui est là pour te dire que non, ce que tu as subi n'est pas normal et que oui, c’est gravissime.

Bien sûr que l'on a peur. Peur de le croiser, parce qu'on vit dans la même ville, sinon ça ne serait pas drôle. Et pas question de déménager, je ne fuirai pas devant mes peurs, j'essaie au contraire de les apprivoiser!
Peur aussi pour ma fille. Parce qu'être mère c'est aussi ça. Ne pas vouloir mais projeter sa vie sur son enfant. Et trembler. Je suis parfois morte de trouille à l'idée qu'il puisse lui arriver quelque chose. Non pas qu'elle meure hein, mais qu'elle subisse ce genre de traumatisme, qui la marquerait à jamais et la ferait souffrir, ELLE, du plus profond de son être.
Peur de rencontrer un homme qui ne comprenne pas. Ou pire, qui ait peur de cela. Je n'ai pas besoin de peurs, j'ai besoin d'amour. De tendresse, et de douceur. Essentielle, la douceur...

Et pourtant... pourtant je crois qu'aujourd'hui, 21 ans plus tard, je commence à aller mieux. Je crois que j'ai détruit tous les remparts qui s'opposaient à la construction d'une vie sexuelle "normale". Que je suis prête à partir sur de bonnes bases. Devenir mère a changé mon corps, qui n'est plus celui qu'il avait "désiré". Petite Elfe m'a offert une seconde chance,je saurai la saisir...
Finalement, après tout ça, je me demande aujourd'hui si mon refus d'accoucher sous péridurale ne tenait pas aussi à ça. Sentir, avoir mal. Vivre pleinement chaque seconde de la transformation de mon corps pour être sûre d'avoir trouvé la paix, ma paix.




mardi 12 juin 2012

731 jours...

Petite Elfe, mon amour...
Il y a trois jours, pour la première fois tu as dit "MA tête", "MA main"... Ça m'a profondément émue, car je me rends compte, de plus en plus que tu grandis, tu t'affirmes en tant qu'être détaché de moi. Tu es Toi, ma Petite Elfe...

Et c'est normal... Aujourd'hui, tu as deux ans. Tout comme la maman que je suis. Deux ans d'amour intense, de bonheur partagé. Tes progrès ont jalonné ces deux années comme autant de pierres sur la route de notre vie. Je suis si fière de toi, mon amour...

Tes éclats de rire parsèment ma vie de perles de bonheur, tes facéties me font rire aux éclats.
Ton caractère bien trempé affirmé ressemble tant au mien... Tu sais exactement ce que tu veux, et tu essaies toujours de m'amadouer avec cet air espiègle et ce joli sourire qui est le tien... En vain, bien souvent...à ton plus grand désespoir.

Tu aimes les livres, que tu dévores passionnément, au sens propre comme au figuré, et rien ne pouvait me faire plus plaisir.
Tu imites le moindre de mes gestes et j'aime t'observer discrètement quand tu crois que je ne t'ai pas vu piquer mon épilateur et te le passer sur les jambes en tentant de le faire fonctionner.
J'adore te voir touiller dans ton gobelet comme je le fais avec ma tasse de thé...ou glisser dans les verres de toute la tablée des bretzels pour touiller l'apéro :D
Je suis fière de toi lorsque tu as des attentions pour les autres, et lorsque ta petite main se glisse jusqu'à ma bouche pour me donner à manger.
J'ai de la chance que tu m'aies choisie pour être ta maman, toi mon enfant si particulière... Toi qui en deux ans m'a appris bien plus sur moi que tous les autres événements de ma vie en 25 ans.

Tu m'as offert le plus beau des cadeaux, lorsque je t'ai sentie bouger en moi pour la première fois le jour de mes 25 ans... Puis ce 12 juin 2010, quand à 4h24 tu as ouvert les yeux sur moi et que la gorge serrée je t'ai souhaité la bienvenue parmi nous. Et chaque jour depuis. Chaque jour qui apporte son lot d'étoiles au fond de nos yeux. Une bruine d'amour sur ma vie.

Cela fait aujourd'hui deux ans que je me dis que chaque journée sans t'avoir vue sourire, c'est une journée à rayer du calendrier...

Je t'aime Arwen, joyeux anniversaire...

mardi 5 juin 2012

L'histoire d'une vie


Aimer, vivre, croire mourir et se relever. Aimer à nouveau pour avancer puis s’effondrer.

Il y a presque un an  j’ai pris la décision la plus grosse de ma vie. Celle d’affronter le regard de ma famille, de prendre ma vie en main, de faire un choix qui marquerait à jamais mon enfant.  J’ai décidé de quitter le père de Petite Elfe.

Les choses ne se font pas sans heurts, quand on a partagé un bout de chemin ensemble on peut tout autant se déchirer, se détester et puis pleurer.

Tout ne s’est pas passé comme prévu, et depuis plusieurs mois c’est une « colocation » aux allures douces-amères qui s’est installée. Vivre séparés mais ensemble. Ne pas se devoir de comptes mais s’en rendre quand même. Vouloir divorcer, vouloir quitter le « domicile conjugal ». Et toujours la même réponse, lancinante… Des problèmes matériels, tout ce que je déteste mais qui jalonne mon quotidien. L’aspect financier des choses a pris une place dans ma vie que j’exècre. 

Cette décision, je l’ai prise depuis longtemps et mes proches en sont désormais tous informés. C’est une Maman Elfe célibataire qui vit désormais aux côtés de son mari. A côté, pas avec. Comme depuis bien longtemps, d’ailleurs. Etrange situation que la vie m’a réservée, étrange épreuve à passer, encore, pour avancer. Je suis confiante, j’aurai la force de le faire. Il n’y a pas de problèmes, uniquement des solutions à inventer.  J’ai décidé d’être inventive.


Parce que, je regarde mes amies autour de moi et… j’ai envie. Envie de croire, envie de construire une autre vie. Envie d’ouvrir un nouveau grimoire vierge à écrire avec Lui. Envie d’aimer à en pleurer. Envie d’avoir peur de le perdre lorsque je suis sans nouvelles de lui depuis quelques heures. Envie de mêler mes doigts aux siens. Envie d’effleurer le contour de son visage jusqu’à en connaître chaque centimètre par cœur. Envie d’atteindre ce moment où mon âme et mon corps se mêlent pour créer la plus belle des danses.

Envie d’entendre que je suis belle à ses yeux. Envie de le voir fier d’être à mes côtés. Envie de montrer à ma fille le vrai visage d’un couple, de lui apprendre l’amour partagé.

J’ai envie de me sentir femme, d’exister à nouveau dans mes yeux au moment où je me noierai dans les Siens. Envie de boire à la source de ma vie sur ses lèvres. Envie de me nourrir de ses paroles. Envie de mourir dans ses bras pour mieux y renaître quelques heures plus tard. Envie de sentir son souffle dans mon cou.

Voilà… j’ai envie… j’ai besoin de L'aimer. Je L’attends, je sais qu’il est là, quelque part, à n’en pas douter. Je sais aussi que je ne dois pas Le chercher, il viendra de lui-même. Peut-être viendra-t-il sur la pointe des pieds pour prendre place peu à peu dans ma vie. Ou peut-être entrera-t-il en trombe dans mon univers comme un cyclone qui viendra balayer mon passé. Peut-être frappera-t-il à ma porte demain. Peut-être mettra-t-il des années à trouver le petit chemin ombragé qui serpente entre les vieux chênes et mène à mon jardin.

 Je suis sûre que je le reconnaîtrai au premier regard. Je crois que je rougirai, un peu, puis que j’ouvrirai grand mes bras pour le serrer contre mon cœur. Et respirer, fort. Le respirer, le découvrir. Et, ma main dans la sienne, commencer à écrire.

Il était une fois…