mardi 22 septembre 2015

De mon éducation et des réseaux sociaux

J'ai deux enfants. Je suis devenue mère à 25 ans, après avoir bien expérimenté la fonction de "belle-mère" et ayant une idée assez précise de là où j'allais.
Bien entendu, mes idées étaient plus que faussées.

Petite Elfe est née et je me suis rendue compte que la violence éducative, ça n'allait pas être possible. Ma belle-fille avait déjà pris quelques fessées sans que le moindre remord ne m'effleure, portée par l'éducation que j'avais reçue, portée par la pression sociale et surtout bricolant ce que je pouvais du haut de mes 21 ans quand je fis sa connaissance.
Oui mais voilà...Petite Elfe, c'était MA fille. La chair de ma chair. Mon enfant. La frapper, c'était impossible.
Je suis donc devenue une maman prônant l'éducation non violente, plutôt à l'aise entre les couches lavables de ma fille, mes purées maison, le portage et tout mon temps libre que je lui consacrais.

Bien sûr, j'étais contre le fait de laisser pleurer son enfant. Les premiers pleurs de Petite Elfe me remuaient tellement que je pleurais avec elle, la serrant contre mon sein. J'ai passé des nuits entières à la bercer pour calmer ses pleurs, à refuser de la laisser seule.
Sauf que... sauf qu'un jour, un jour où j'étais chez un thérapeute, elle a pleuré. Elle était là, dans sa poussette, fatiguée, à attendre la fin de ma séance et elle a commencé à pleurer pour me dire sa fatigue. J'étais désolée, en colère de ne pas pouvoir la prendre. J'étais embêtée, j'en aurais pleuré mais il fallait attendre quelques minutes. C'était comme ça, je n'avais pas le choix. Ce jour-là, elle a pleuré moins de 5 minutes dans sa poussette. Puis elle s'est instantanément arrêté et a dormi pendant deux heures. Sans moi, sans se réveiller en panique. Elle était si calme, si belle dans son sommeil.

Cette journée-là a allumé une petite lumière en moi. Je me suis autorisée à réfléchir. Moi qui depuis des semaines ne savais pas commencer gérer l'endormissement de ma fille dans les pleurs, et qui de fait avait une enfant qui ne dormait jamais autrement que dans sa poussette, je tenais peut-être là une piste.
J'ai observé. Je me suis rendue compte que mes bras l'énervaient, que quand elle commençait à pleurer c'était déjà trop tard et que rien ne la calmait plus alors. Sauf que les signes avant les pleurs étaient indétectables pour moi. Je ne savais pas bien quoi faire. Alors, je l'ai fait. Je l'ai déposée dans son lit, en lui expliquant, en lui parlant de mon incapacité à la calmer. Elle pleurait mais je l'ai fait. Je l'ai posée doucement dans son lit et je suis sortie. En l'écoutant pleurer derrière la porte, de longues minutes. Et puis dormir. Plusieurs heures. Dans son lit, sans moi. Sans se réveiller au moindre bruit.
Ca a duré des mois. Des mois durant lesquels elle n'a pas su s'endormir sans pleurer de longues minutes. A la sieste, le soir. Des mois, puis...ca s'est arrêté comme c'était venu.
J'avais fait ce que je pouvais, avec mes moyens et mon état émotionnel. Je me sentais armée pour la suite.

Trois ans et des pâquerettes plus tard, voilà Petite Plume. Ma grossesse s'est émotionnellement mal passée. Très mal. Sans entrer dans les détails, je me sens mal, pas heureuse et surtout, surtout, énormément coupable vis-à-vis de cette enfant qui débarque dans ma vie et ne demande qu'à avoir des parents aimants.

La CUL.PA.BI.LI.TE. Quelle saloperie. La culpabilité, c'est le pire bouton sur lequel tu peux appuyer pour une jeune maman. Ca fait mal et ça marche à tous les coups.

Parce que voilà, dans le contexte, je me sens coupable. Mais ça, c'est rien face à la déferlante de culpabilité qui va me noyer sous ma fréquentation des réseaux sociaux. Pourquoi? Parce que j'ai trop lu.

J'étais crevée, fragile. J'ai lu tellement de billets que j'ai vu passer sur des blogs, des sites "spécialisés". J'ai fréquenté assidument les écrits de la Leche League.
 J'ai lu Rufo....
 Mais non, j'déconne !

J'ai eu peur. Peur d'être une mauvaise mère. Peur de traumatiser mon enfant si :
Je ne l'allaitais pas aux moindres signes d'éveil quand elle était nourrisson
Je ne la portais pas dès que le besoin de proximité se faisait sentir
Je la laissais pleurer
Je lui imposais des horaires de tétées
Et tout le reste...
Je l'avais bien lu, que si je ratais ça, elle risquait de devenir dépressive à 40 ans, de ne jamais avoir confiance en moi ou bien en elle. D'être mal dans sa peau, d'être une enfant renfermée ou une adulte en colère.
Alors oui j'exagère. A peine.

Bien sûr que j'aurais du plus réfléchir ( ou moins). Faire le tri dans ce que je lisais. M'écouter. Sauf qu'à l'époque, m'écouter, c'était pas possible. J'étais sur le fil de la déprime, je voyais la dépression me tendre les bras juste en-dessous et je ne pouvais pas me permettre de me glisser dedans. Je me suis raccrochée à ce que je pouvais. Les avis des "spécialistes".

Aujourd'hui je commence tout juste à me relever. A prendre conscience de ce qui va, de ce qui ne va pas. A faire le point. A envisager doucement le sevrage, parce que je suis à la fois fière et comme repue de ces 21 mois d'allaitement. Je commence à réaliser que les réseaux sociaux, à cette époque, loin de m'aider, m'ont complètement plombée. Par l'usage que j'en ai fait. Par l’échappatoire néfaste qu'ils étaient devenus.

Aujourd'hui, je réalise que pour la première fois de ma vie, je suis tombée dans le piège le plus basique qui soit, les deux pieds devant et sans filet. Comme une bleue. La faute à moi, à cette putain de culpabilité que j'ai laissée me ronger jusqu'à l'os, encore et encore.

Ca va être long. Reprendre possession de moi, de mes envies, de mes besoins. Etre la mère aimante et attentionnée que je veux sans être "trop". Etre toujours bienveillante mais en me protégeant.

J'aurais jamais pensé, il y a même deux ans que ça pouvait s'avérer si compliqué d'avoir des enfants...
J'écrivais il y a 4 ans sur le plus beau métier du monde, aujourd'hui j'écris sur le plus difficile aussi. Heureusement que l'amour, ça paye bien!

1 commentaire:

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